Trek dans les Annapurna #2
Jour 5 : De Chame (2710m) à Lower Pisang (3250m) : 14,5km
Finalement, nous avons décidé de ne pas passer nos 2 nuits à
Chame. Puisqu’il qu’il n’y a pas d’électricité, qu’internet ne fonctionne pas, nous
n’avons pas grand-chose à faire ici.
Réfrigérateur à ciel ouvert
Et puis seule la marche arrive à nous réchauffer, donc, nous reprenons la route direction Lower Pisang mais sans grande conviction. Nous sommes assez fatigués et nous ne savons pas si nous arriverons jusque là. D’autant que sur le chemin, nous allons devoir nous faire 3 grosses montées (celles qui sont représentées par des doubles flèches sur notre guide… celles qu’on redoute à chaque fois !).
Mais ce type de paysage permet de faire passer la double flèche ;-)
Arrivés à Bhratang (seule étape entre Chame et Lower Pisang), en voyant les maisons bien mal isolées, nous prenons vite la décision de continuer le chemin. Il fait trop froid et là où l’eau a coulé, elle est toute gelée. Même dans les puissantes cascades, c’est vous dire !!
Bhratang et ses maisons où il doit faire bien froid la nuit !
Aujourd’hui, nous avons vu de près le mont Annapurna 2, et
on croit avoir vu un bout d’un autre Annapurna, mais lequel ? Pas facile
de se repérer ! Et puis gros coup de chance, nous avons vu notre premier
et dernier yak ! Il était là, dans ce paysage sec et froid, à nous regarder.
Nous étions seuls tous les 3. La bête est imposante, avec de grandes cornes et
des poils longs ! Cette fois-ci, c’est sûr, c’en était un !!
Un yak ! Spéciale dédicace JM Despierres (et des cailloux ;-)
Alors voilà, finalement nous sommes allés vaillamment jusqu’à Lower Pisang. Comme à chaque fois qu’on pense ne pas pouvoir y arriver, on y arrive et ce, même avec le "mal des montagnes" qui commence à se faire sentir légèrement (un peu mal au crâne).
La porte d'arrivée
Upper Pisang, un peu plus haut... mais si, en bas à gauche !!
Pour cette nuit, notre chambre est bien isolée et nous avons pu nous laver avec un grand seau d’eau bien chaude. Ce soir nous dinerons dans une salle chauffée au poêle, rien que tous les deux en amoureux :-) Et au menu de ce soir, du yak !! Visiblement il est à l’honneur aujourd’hui ! Au bout d’un moment, l’électricité s’arrête ! Certainement la station hydroélectrique qui a gelé, ou stoppée par précaution. Très vite nos hôtes viennent nous apporter la lumière. Nous sommes vraiment bien chouchoutés ! Pour finir, nous allons nous endormir devant « Le mac » grâce à notre petit pc (on s'est bien marré !). Malgré le froid, il tient bien la route lui aussi ! Brave petit computer !!
Jour 6 : De Lower Pisang (3250m) à Manang (3540m) : 15km
Nous y sommes arrivés !!
Certainement grâce aux pierres magiques...
ou aux gros moulins à prières...
ou peut être grâce à nos bâtons ;-)
Mais le soir nous sommes trop las pour rédiger nos quelques notes sur la journée. De mémoire, elle n’a pas été trop difficile. Passée la grosse montée du matin, c’est du plat tout le temps et puis quelle satisfaction d’avoir atteint notre objectif ! Sur le chemin, on se demande si finalement nous n’allons pas pousser jusqu’au sommet (Thorung Pass).
La vague, c'est comme ça qu'on l'appelle
Un bout d'Annapurna 2 ?
Mais le destin va vite en décider autrement. Vers 21H, Sonia se sent mal, elle court aux toilettes et là, le verdict est sans appel : Gastro ? Tourista ? On ne sait pas trop mais quoi qu’il en soit, quelque chose de vraiment foudroyant ! Ce n’est même plus la peine de penser au col de Thorung. Jamais elle n’aura les forces nécessaires pour les triples flèches à gravir ! La nuit est interminable. Par chance, pour la première fois depuis le trek, les toilettes se trouvent dans notre chambre. Comme en Thaïlande, lorsqu’elle pensait qu’on lui couperait la jambe à cause d’une vilaine plaie au genou, Sonia délire. « J’ai plus de tube digestif !! ». Yann restera toute la nuit aux petits soins pour elle :-)
Jour 7 et 8 : Manang (3540m)
De Manang, Sonia n’aura vu que la chambre 304. Yann s’occupe d’elle autant qu’il peut mais il n’y a pas grand-chose à faire qu’attendre. Heureusement, il rencontre 2 français (Yann et Benoit) qui effectuent un tour du monde de 18 mois. Ça lui fait de la compagnie. Ces deux là regrettent d’avoir opté pour un guide népalais qui est incapable de répondre à leur moindre question. Et dire qu’ils l’ont payé 390 dollars ! Par exemple, pendant tout le trajet, le guide prétend que les nombreuses vaches croisées sont des yaks. Quand les français apprennent la vérité, ils n’ont plus qu’à se faire une raison… mieux vaut en rire ! Ils sont bien sympas et on espère pouvoir passer le nouvel an avec eux à Pokhara.
Mis à part ça, pendant que Sonia fusionne doucement avec son lit, Yann en profite pour aller voir le lac gelé un peu plus haut dans la montagne. Que c’est beau !!
Le lac gelé de Manang
Jour 9 : De Manang (3540m) à Bhraga (3450m) : 2km :-)
Première tentative de départ, mais au bout d’une demie-heure de marche, Sonia est HS. Et puis il y a un vent à décorner un yak. Nous décidons de ne pas pousser plus loin. La patronne de notre guesthouse, en voyant Sonia pleurer (de ras le bol ? de douleur ? de fatigue ?) nous demande ce qu’il se passe. Quand elle apprend que Sonia est malade, elle lui propose un thé au gingembre (un des seuls aliments que Sonia déteste ;-) Mais qui ne tente rien n'a rien. Pour ce soir, nous nous endormons avec pour fond sonore le « rire » des hyènes. Quel étrange concert !
Jour 10 : De Bhraga (3450m) à Lower Pissang (3250m) : 13 km
Deuxième tentative de départ. Cette fois-ci, c’est la bonne ! Pour Sonia ce n’est pas une partie de plaisir mais Yann tente de la faire rêver en racontant tout le confort que nous allons retrouver à Pokhara… Il faut croire que ça marche ;-)
Sans transition, nous sommes le 24 décembre.
C'est Nowel !! Nouveau concept d'abat jour :-)
Au menu de ce soir :
T'as à peine franchi la porte :
Champagne Delamotte 1999
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Amuse bouche :
Huitres au jus de citron. Tiens, passes moi la sauce vinaigre échalote pour voir
Vin : Bâtard-Montrachet Grand Cru 2007, J. Drouhin
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Entrée 1 :
Saumon fumé et toasts chauds dorés au beurre salé de Guérande
Vin : Château Talbot "Caillou Blanc" 1998
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Entrée 2 :
Foie gras sur sa fine tranche de pain d’épice grillée
Vin : Gewurztraminer Vendanges Tardives 2006, Doppf et Irion
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Plat :
Dinde farcie aux marrons accompagnée d’un écrasé de pomme de
terres façon môman
Vin : Grands Echezeaux Grand Cru 2007, J. Drouhin
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Fromage et salade aux noix :
Camembert, Roquefort, Trappe Echourgnac, Banon, Brebis, Epoisses …
Vin : Château Léoville Las Case 1990, Saint-Julien
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Dessert :
Buche glacée aux parfums exotiques
Vin : Sauternes Château Guiraud 1999
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Digestif :
Chocolats Leonidas et marrons glacés
Liqueur : Framboise des Bois et des Jardins, Peuchet
Cigare : Cohiba Churchill
Comme on a pu vous envier !! A nos hôtes, on explique que ce soir est spécial pour nous. On ne peut pas leur traduire le menu de nos rêves mais dans nos yeux, ils se régalent :-). Puis arrivent notre vrai repas. « Pizza » aux légumes pour Yann, riz au poulet pour Sonia :-( Dans notre sac, nous avions emporté le père noël en chocolat qu’Amandine et Tony nous avaient offert avant de partir. A cause de sa maladie, Sonia ne peut même pas en manger. Yann quant à lui, décide de rester solidaire.
Jour 11, 12 et 13 : De Lower Pisang (3250m) à la fin (environ Ghermu) : 53km
Depuis le lac de Manang, nous n’avons pris presque aucune photo, on est bien trop pressé ! Nous pensions trouver une banque à Chame et à Manang, mais rien ! A Chame, il n’y avait pas d'électricité et à Manang il n’y avait pas de banque !!
Nous avons été trop optimistes et maintenant, nous devons redescendre au plus vite, avec 12 € par jour à deux. C’est suffisant pour dormir et manger simplement. Beaucoup de patates et de pâtes à l’eau :-) Avec mention spéciale, pour les pâtes natures qu’on aura mangées à Danaqyu (bouillies et servies dans un jus improbable :-).
Aussi, comme le temps presse, les étapes sont plus longues ! En fin de journée, nous sommes cassés en deux. Aujourd’hui, nos chevilles n’arrêtaient pas de se tordre. On en rigole nerveusement :-) Il faut voir l’état de certains sentiers ! En pente, dénivelé positif, négatif, ça s’enchaine, des petits cailloux, de gros cailloux en guise de grosses marches, parfois les 2 en même temps !
Nous croisons pas mal de trekkeurs en descendant. Bien plus qu’à l’aller. Sur les étapes les plus difficiles (celles où ça monte tellement qu’on a mal aux cuisses au bout de 5 minutes alors que 25 minutes pires encore suivent), la première question est toujours : « c’est encore loin la prochaine étape ? ». Puis vient la deuxième : « Vous avez passé le col de Thorung !? ». Pour ne pas les décourager, on essaie toujours de rester optimiste, mais dès qu’ils sont partis, on se dit : « les pauvres comme je les plains ! ».
Et encore, les plus à plaindre sont sûrement les porteurs que nous croisons. On en a vus qui transportait des poteaux électriques d’au moins 3 mètres dans des sentiers qui ne dépassent pas le mètre de large (et attention dans l’un des pires !!). Mais comment font-ils ? Ça ne passe pas !! Et bien si ! Ils font la montée en marchant en travers, en crabe quoi ! C’est fou ! Parfois même, ils sont pieds nus et croyez bien que dans ces moments là, on n'a plus mal aux pieds !
Autre chose, sur le trajet d’aujourd’hui, nous avons de nouveau croisé des hommes qui tentaient de tirer un bœuf et un veau sur un pont suspendu. Cette fois-ci, nous les avons vus de loin. Un moment on est resté assis en se disant qu’on était trop fatigués pour les aider et puis finalement nous y sommes allés. C’est qu’on y prend goût finalement :-)
Puis une fois franchi le village de Jagat, nous étions en pause quand une jeep passe devant nous. Ça faisait 10 jours qu’on n’avait pas vus de voiture ! On reste là, bouche bée et on se souvient que des jeeps font la liaison entre Besisahar et Jagat. De loin, on la voit s’arrêter dans le village, on n'ose même plus bouger. On n'a plus d’argent mais il faut qu’on négocie. On n’en peut plus et demain, une étape de 22km nous attend (la dernière). Finalement, la jeep ne semble pas vouloir revenir. On n’a pas le choix, il faut reprendre la route. Encore une grosse descente. Nos jambes ne suivent presque plus. On manque de se casser la binette toutes les 10 minutes. Et puis au bout de cette descente, il y a ce mec ! Il vient nous voir et nous demande si nous allons à Besisahar ? Bin oui on en rêve depuis au moins 5 jours ! « Vous voulez y aller en jeep ? ». On s’est regardé, et là en ¼ de seconde notre décision était prise !! « OUI !! Mais on ne pourra vous payer qu’à Besisahar ! ». Le conducteur est d’accord mais il faudra dormir une nuit de plus dans les montagnes (à Syange). Le départ est prévu pour demain matin. Le trek prend fin !
BILAN :
13 jours de trek, 158 km parcourus, un sommet à 3540m (en partant de 820m) et des chemins tortueux à souhait. Nous sommes lessivés, crados au possible (5 jours sans douche, notre max) mais vraiment contents de nous ! Sans porteur, sans mule :-) juste à la force de nos jambes et de nos bâtons, nous avons atteint notre objectif !
Les paysages étaient magnifiques (surtout en deçà de 2000m) et les népalais que nous avons rencontrés, étaient tous (enfin presque) d’une gentillesse remarquable. Toujours souriants, avenants, curieux d’en savoir plus sur nous et soucieux de notre bien être. L’un des derniers que nous avons rencontré nous a dit « prenez le temps d’oublier la difficulté. Vous verrez, vous aurez envie de recommencer ! ». Il n’avait pas tort le bougre ;-) … En quittant la montagne, dans la jeep, nous nous sentions déjà réconciliés avec les montées, nous avions le cœur gros et la gorge tellement serrée.